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Voyage au bout de la misère

Mission à Tamatave du 3 au 17 octobre 2011.

Lorsque mon mari Guy et moi-même nous sommes décidés à partir en mission humanitaire, nous avons commencé un voyage vers l’inconnu, longtemps souhaité mais un peu appréhendé.
Nous sommes arrivés sur le terrain avec nos certitudes d’occidentaux mais nous nous sommes rapidement rendus compte, au fil des jours, que tout n’est pas si simple et que toute une population doit faire avec le peu dont elle dispose en cherchant chaque jour des solutions à des problèmes parfois insolubles.


Après un long voyage, nous somme arrivés à l’ONG en compagnie de Monique et Floréal Gracia et de Josiane leur amie et avons été accueillis par Mme Odette. Le lendemain, Guy est parti avec le Dr Hari pour assister aux consultations et commencer une collaboration très instructive, chacun apportant à l’autre son savoir.

Au cours des jours suivants, Josiane, Monique et moi avons accueilli à tour de rôle les filleuls pour discuter ensemble de leurs résultats scolaires, leur avenir, leur situation familiale etc. Ensuite nous avons étudié, avec le Dr Hari, les cas complexes auxquels étaient confrontés les médecins. C’est là que nous avons appris que la population n’était pas vaccinée après la petite enfance car cela coûtait trop cher aux familles. Par ailleurs, le grand nombre d’aveugles que nous voyions l’étaient devenus par carence en vitamine A, les déformations osseuses étaient dues à des carences en vitamine D, les dosages biologiques les plus simples ne pouvaient être effectués dans le pays. Tant de choses nous paraissant banales et qui là-bas engendrent beaucoup de malheurs.
Nous sommes allés visiter le service de pédiatrie de l’hôpital et nous avons constaté l’impuissance du chef de service qui ne peut rien faire par absence d’appareils de diagnostic, d’analyses médicales, de médicaments. Les familles doivent régler le séjour à l’hôpital, les médicaments, apporter la nourriture et les draps et ne disposent d’aucune couverture sociale. La salle de réanimation se résume à un vieux lit rouillé dans une pièce décrépie avec une bouteille d’oxygène.

Quelques jours plus tard Mme Lydia nous a accueillis à l’orphelinat « Maison Antoine » où après avoir trié et classé l’armoire à pharmacie, formé le personnel à l’utilisation de différents appareils, nous avons organisé une réunion sur l’importance de l’hygiène, les premiers secours et la conduite à tenir lors de la manipulation de médicaments. La mise en place d’une vaccination du personnel a été évoquée car le contact avec de jeunes enfants parfois porteurs de maladies graves est permanent. Nous avons établi un budget et les modalités de cette vaccination avec le Dr Hari.
Par ailleurs, la maison de Pierre étant presque terminée, nous avons proposé aux jeunes filles parrainées une réunion d’information sur la sexualité, les infections sexuellement transmissibles et la contraception. Elles se sont déplacées nombreuses pour écouter et poser des questions.
Enfin la plus grosse partie de ma mission consistait à établir un budget santé avec le Dr Hari. En effet depuis l’interdiction de récupérer les MNU (médicaments non utilisés) pour les envoyer à l’étranger, il faut trouver une autre façon de se fournir en médicaments et la moins coûteuse pour l’ONG. Nous avons donc signé un partenariat avec une centrale d’achat sur place qui peut nous procurer des médicaments génériques et étudié les autres circuits d’approvisionnement à Madagascar et en France.

Au cours de nos entretiens avec les enfants et les familles, nous avons constaté également un nombre très élevé d’handicapés mentaux ou moteurs dus à des accouchements difficiles, non assistés, ainsi que de nombreuses pathologies dues à un retard de prise en charge, les soins coûtant trop chers ou la distance étant trop importante pour consulter un médecin. Les structures d’Etat sont inexistantes par conséquent tous ces malades restent dans les familles avec les difficultés financières et les contraintes que cela entraînent.
Cependant nous avons pu observer que tout ceci a permis de garder un lien profond intergénérationnel. Un grand nombre de familles sont monoparentales, soit par décès, soit par départ des pères pour d’autres foyers. Nous avons croisé des mères et des grands-mères extraordinaires qui travaillent dur pour assurer la charge de la famille.

Après avoir reçu les enfants parrainés, examiné les membres du personnel des différentes structures, nous être imprégnés de la vie de la population au quotidien, nous avons pu faire le parallèle entre la population prise en charge par l’ONG et celle qui est encore dans la misère. C’est là que l’on comprend l’utilité de l’action de TDE, que l’on voit qu’un enfant parrainé est sauvé, qu’il va avoir accès aux soins, à l’éducation et qu’il va manger à sa faim. Les résultats sont formidables et cela fait chaud au cœur de voir tous ces enfants joyeux entrer à l’école et pour qui un avenir peut se dessiner malgré les difficultés de la vie.

Comme souvent, malgré l’extrême dénuement dans lequel vit cette population malgache, elle est riche de sa générosité et nous l’avons constaté tout au long de notre voyage. C’est pourquoi, je tiens à remercier chaleureusement toutes les personnes que nous avons rencontrées pour leur gentillesse et leur accueil, en particulier Mme Odette, Dr Hari et Sylvie, les membres du bureau (Claudine, Lydie, Romy, Abel, Sébastien, Liva), Mme Lydia, Mme Vienne et Clarisse, notre voisine de chambrée.

Je remercie également Monique et Floréal de nous avoir permis de réaliser cette mission et de nous avoir contaminé par le merveilleux virus de « Terre des enfants » ainsi que Josiane pour sa présence active et joyeuse. Nous avons partagé tous les cinq de joyeux fous rires nous permettant d’évacuer la tension après des journées toujours riches en émotions mais surtout des moments rares d’humanité.
Nous sommes repartis enrichis de cette expérience, notre vision des choses est à jamais transformée et cette grande aventure humaine restera gravée dans nos mémoires.

Que tous les donateurs soient remerciés, leur geste permet d’améliorer la vie de ces enfants du bout du monde, une goutte d’eau dans l’océan diront certains, c’est vrai, mais une goutte d’eau qui nous l’avons constaté sur place, permet à un certain nombre de s’éloigner de la misère et d’envisager un avenir meilleur et cela c’est une réalité.

Florence Cicorelli, pharmacienne à Codognan.